15 mars 2007
1. Une proposition crédible de changement.
Dire que le projet Bayrou est creux ou vague semble signifier essentiellement qu'il n'y a pas un parti pour le mettre en œuvre. Mais on ne peut pas dire que ça ne repose sur rien, quand seul il est le seul à oser annoncer la couleur quant à la dette et à promettre de réformer l'état, quand, face à la désintégration sociale, son approche politique même remet les bonnes volontés au cœur du système, ou bien quand il fait de l'éducation nationale, non pas une priorité parmi d'autres, une priorité rhétorique, mais la seule priorité budgétaire, le seul poste échappant à l'allègement.
La force du projet de Bayrou et d'identifier la crise actuelle et de proposer des pistes pour en sortir qui sont crédibles et qui, en tous cas, n'ont pas été tentées. Mais j'en reparlerai.
2. Le refus du partisanisme
Le refus du système des partis est un élément essentiel qui rend ce projet crédible.Il ne serait pas possible de croire à une promesse d'interdiction du déficit de fonctionnement venant du PS et de l'UMP, qui sont pris dans des logiques partisanes, claniques et politiques rigides.Le refus des logiques partisanes, et en somme des logiques de conflit, est une caractéristique de la candidature Bayrou. Il ne s'agit pas d'un projet "ni droite ni gauche", (ce qui veut le plus souvent dire d'extrême droite), mais d'un projet d'union, comme on l'a beaucoup dit. Ceux qui nous disent que ça ne marche pas n'ont jamais voulu l'essayer.
Et pourtant, dans ce pays en crise, en déclin économique, qui n'investit plus dans sa recherche et son enseignement, dont la société est en voie de désintégration avec plus de cinq millions d'exclus, ou plus de 20% des élèves ne savent pas lire en sixième, et dont les seuls intérêts de la dette absorbent plus que l'impôt sur le revenu, est-il vraiment raisonnable, et utile, de continuer à considérer comme indépassables les oppositions droite et gauche, économie et social, jeunes et vieux, immigrés et identité nationales, profs et élèves, fonctionnaires et travailleurs du secteur privé, riches et pauvres, banlieues et centre ville, bobos et France d'en bas, Vel Satis et 607?
Strauss-Kahn a bien raison de dire qu'on ne parle pas des vrais problèmes dans cette campagne, et que ça explique le succès de Bayrou. Ce faisant, il reconnaît implicitement que Bayrou aborde ces vrais problèmes, et qu'il est récompensé pour ça.
Sur ces questions fondamentales de la dette, de la désintégration sociale, et de l'absence d'investissement dans l'avenir, qui n'est pas d'accord?Le fossé entre Strauss-Kahn et Borloo est-il plus apparent qu'entre Strauss-Kahn et Emmanuelli? (Pour ne parler que des bons vivants).
Il est d'ailleurs frappant à cet égard, qu'on continue à sur-interpréter les déclarations et les écrits des uns et des autres pour les ramener à des positions partisanes. Strauss-Kahn dit qu'il refuse d'envisager l'hypothèse de Bayrou président, et on dit qu'il refuse de s'allier avec lui. Alors qu'il l'a appelé à former "une belle majorité pour faire battre Nicolas Sarkozy". Joffrin écrit que Bayrou, c'est le saut dans l'inconnu, la page blanche, peut-être ce que les français veulent, et on dit qu'il est hostile à Bayrou.
Partout, tout se passe comme si on refusait de faire abstraction une minute de ces dichotomies incontournables. Combien entend-on de témoignages comme celui de ce monsieur sur le quai de gare qui nous expliquait que "Bayrou, il a toujours été du côté des patrons".
On vient tous de quelque part. Sarkozy, c'est Pasqua le mafieux et Chirac le traitre. Ségo, c'est Mitterrand l'économiquement incompétent (ce que je trouve mieux, mais tout le monde n'est pas de mon avis).
3. Le positionnement politique... "iconoclaste"
Imaginons Bayrou élu. Quelles sont ses chances d'être réélu? Arrêtez de rire! Il n'aura pas un parti derrière lui. Ca lui coupe la possibilité qu'ont habituellement les autres: élus sur un programme, ils mettent leur bande au pouvoir, et gouvernent selon la ligne de moindre résistance avec les prochaines élections dans le viseur. C'est pas pour leur jeter la pierre: c'est la logique du système même. Mais c'est quand même pour ça que, en toute logique, la dette, qui n'a pas de coût politique, s'accumule. Et que l'investissement, la recherche et l'éducation sont négligés au profit des routiers et de tout ce qui peut faire le plus de dégâts immédiats.
Bayrou, venant d'une UDF déplumée depuis qu'elle n'est plus la façade centriste et pro-facho à la fois (rappelez-vous de Plunkett et les éditorialistes UDF du Figmag...) du RPR/UMP, n'a simplement pas les moyens de jouer ce jeu-là. Il n'est que de noter comment tout le reste du paysage politique parle de lui, pour le crédibiliser comme candidat anti- "système des partis".
Pas "antisystème", note. Bayrou, il croit à la démocratie, à l'entreprise, à l'école républicaine et plutôt laïque (je me souviens de la loi Falloux quand même: mais je considère que Strauss-Kahn dans son gouvernement serait un garde-fou suffisant si ses penchants bigots ressurgissaient). Donc c'est juste du système politique qu'on parle, celui qui, comme Bayrou l'a dit abondamment, se partage entre deux bandes rivales.
Et puis imagine-le pas élu, le François: qu'est-ce qu'il fait? Il est pas bien positionné pour un maroquin où que ce soit, le Béarnais. Bon bien sûr il préparera la Présidentielle 2012. Mais c'est loin.Il a raison de dire que les français, s'ils l'élisent, lui donneront une majorité. Mais ils ont raison aussi, ceux qui disent qu'il n'aura pas un grand parti derrière lui.
Ce reproche sur l'in-gouvernabilité, c'est précisément ça qui le rend crédible quand il dit qu'il dépasse les clivages. Il y a incohérence entre dire qu'il ne pourra gouverner et dire qu'il est toujours autant de droite. A cause de ça, la tentation pour lui de dévier de ce qu'il a promis (l'approche non partisane, la guerre agressive au déficit de fonctionnement, la priorité réelle à l'éducation et à la recherche, etc.) sera moindre que pour les autres.
On peut faire confiance aux hommes, mais il est préférable que les situations les épaulent.Bayrou, on se moque, mais il est enchaîné par son positionnement iconoclaste. Les autres ne peuvent pas en dire autant. Enfin si, Ségolène restera une femme pour longtemps, et comme c'est son principal engagement de campagne...
vendredi 23 mars 2007
Atouts de Bayrou
à 12:12
Libellés : En français, France 2007
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