1er mai 2007
Nous faisions étape le 1er mai à Chalons, avec mon guide Michelin tout neuf. C'est comme ça que nous avons dîné à l'Hôtel d'Angleterre, une étoile, la bonne maison locale.
On y mange très bien- une cuisine qui est fine, plutôt joyeuse, et qui laisse une bonne impression. Un souvenir saillant est celui d'un pressé d'anguilles et foie gras, avec des pommes, du caviar, une sauce vodka. C'est donc un foie gras aux saveurs marines, un foie gras léger, enjoué. Il y a des beaux cubes de pomme, tous brillants d'avoir été encore un fruit il y a cinq minutes, posés sur une crème dont j'ai aucune idée comment elle est parfumée à la Vodka. Quelques cuillères de caviar que je suppose d'Aquitaine (vu le prix raisonnable du plat), en alternance autour de cette tranche de terrine centrale. Et du pain de campagne grillé sur le côté.
Bon, c'est très compliqué de se faire une cuillère, ou une tartine, avec un peu de tout. D'autant que la terrine a deux couches de foie gras et une d'anguille et que les cubes de pommes font bien un centimètre de côté. Mais ça vaut le coup d’essayer : l'équilibre entre le gras, l'iode et la vapeur de Vodka est vraiment réussi, il rappelle un peu pourquoi on aime les blinis avec la crème, le caviar, la Vodka, mais en plus terrien, comme si les esturgeons avaient mutés et étaient devenus des animaux à pattes.
Avec, un Condrieu un peu cher (64€ pour une demi-bouteille mais y a-t-il encore des Condrieu, ou des Côtes-Rôties accessibles?) fait aussi une bonne alliance. Son acidité et son amertume légère disparaissent au contact de ces bouchées compliquées à produire, et il y reste une douceur qui complète le plat, excite les papilles immédiatement, avant de faire place à l'iode et aux harmoniques de ces deux-là portées par le foie-gras, la crème, le vin.
Le même fait aussi une belle alliance, bien plus pétillante et acide, avec une des spécialités de la maison: une nage de langoustines au Chardonnay. Les langoustines sont parfaitement cuites, fermes et fondantes. La nage est subtile, pas trop crémée, avec toute la complexité du vin. Et la brutalité de l'un comme de l'autre est polie par des petits légumes nombreux. Une soupe de rêve, en somme.
Une spécialité très appréciée de la maison, nous dit-on, est cette lotte lardée avec des légumes de printemps. C’est pourtant un plat qui, à mon avis, ne marche pas. Le lard entoure des trois petits médaillons de lotte, bien fraiche, ferme, blanche et brillante. Il en écrase les saveurs. Ces trois ou quatre petits médaillons sont disposés autour d’un gros paquet de légumes divers en très fine julienne, emballés dans des pois gourmands. C’est un magnifique plat de légume : saveurs et cuissons précises, distinctes mais se fondant bien ensemble. Mais le lard le fait paraître fadasse, et les légumes se vengent et soulignent sa rusticité, sa brutalité.
Le ris de veau, lui, est sans surprise mais sans reproche, il me ravit. Un dessert très simple fait de gariguettes poêlées, pain perdu, glace au fromage blanc confirme la très bonne impression générale : les gariguettes, je le dis sans vouloir offenser personne, sont certes françaises mais pourtant souvent un peu fadasses. Pas celles-ci, dont le rapide passage à la poêle développe les saveurs. Mon amoureuse a un bien beau soufflé au chocolat, dont elle regrette que le sucre se sente trop. C’est un problème général des soufflés, mais je pense que l’équilibre de celui-ci est très réussi en goût et que moins de sucre laisserait le chocolat trop amer pour être bon. Ce qui se passe, c’est qu’on sent les grains de sucres dans le soufflé, et c’est perturbant. Difficile de décider si on aime ça ou pas, mais ça ne manque pas de personnalité. Je voudrais bien, par curiosité, essayer le même soufflé avec du sucre glace : même goût, mais une mâche qui serait toute différente.
Un mot d’un service jeune et très professionnel, très aimable et causant mais pas envahissant, qui a l’air content de son sort. La salle a tout le charme des bonnes maisons de province avec ses lambris modernes, ses miroirs, ses bibelots, ses fleurs. L’addition est de 250€ pour deux, ce qui incite aux comparaisons et aux questions sur le rapport qualité-prix (éternel problème de la bonne cuisine). Mais c’était une belle soirée.
vendredi 18 mai 2007
L'hôtel d'Angleterre, à Châlons-en-Champagne
à 11:17
Libellés : En français, Restaurants
Inscription à :
Publier les commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire