On me demande parfois où trouver un très bon millefeuille. Malheureusement, ma réponse était jusqu’alors invariablement quelque restaurant de haute volée, parce que le bon millefeuille doit être frais. Immanquablement, un millefeuille qui traîne dans une vitrine aura la pâte feuilleté toute trempée, à moins qu’elle n’ait été « blindée » par quelque glaçage ou autre artifice. Si en plus la vitrine était réfrigérée, la pâte feuilletée sera devenue toute cartonnée. Non, il y faut une pâte friable et une crème pâtissière bien fraîche et brillante. Comme le dit le héros de ce post « si on peut le manger proprement, c’est qu’il n’est pas bon ».
Jacques Génin offre, pour la première fois à ma connaissance à Paris, dans sa confiserie/pâtisserie/salon de thé de la rue de Turenne, cette fraîcheur qui, jusqu’alors, était réservée aux clients des grands restaurants. Et cette vérité de la fraîcheur qu’il défend, il l’applique non seulement aux grands classiques de la pâtisserie – l’éclair et le Paris-Brest, la tarte au citron et le millefeuille – mais il l’étend également à la confiserie, qui est souvent la grande victime non seulement du réfrigérateur mais du garde-manger.
Les chocolats de Jaques Génin, ses caramels, n’ont pas une date de péremption, mais une date de fabrication. Interdit de les manger plus de huit jours après conception. D’ailleurs, ceux à qui il en reste après huit jours n’ont que ce qu’ils méritent : un goût évanoui, une texture compromise, un méchant truc mort.
Comme feu Bernard Loiseau, Jacques Génin remplace ainsi le beurre et le sucre par la fraîcheur, qui apporte l’onctuosité et la douceur nécessaire, ainsi que l’irremplaçable vie de l’aliment frais, son
chi chi vous voulez, cette façon de vous chatouiller les papilles et de vous envahir le palais, de vous parler de nature et d’harmonie. Voyez ainsi les chocolats à la menthe de Jaques Génin, comme une légère infusion de menthe fraîche, pas un After Eight qui pique le nez, mais une caresse chlorophyllée, dont la durée en bouche dialogue avec celle du chocolat, tout aussi frais.
Inutile que je vous parle aussi des caramels, des rochers, et de la tarte aux framboises. Allez-y et ne gardez rien que des souvenirs et de l’envie. C’est aussi un salon de thé ridiculement spacieux, concentré sur la qualité des thés et du service autant que sur la pâtisserie. PS: c'est
Bruno Verjus qui m'a filé le tuyau. Sacré gourmand, celui-là.
Jacques Génin, 133, rue de Turenne, 01 45 77 29 01, fermé le lundi. Même pas très cher, avec l'éclair (de compétition) à moins de cinq euros.